lundi 4 avril 2011

la Somalie

K'Naan : "Somalia" (2009)

Lorsque la Somalie se distingue dans l'actualité, c'est rarement à son avantage. Sont ainsi évoqués la piraterie, en augmentation ces dernières années, la première place du pays auclassement mondial des pays les plus corrompus (devant l'Afghanistan) ou la non-ratification de la Convention Internationale des Droits de l'Enfant (caractéristique que la Somalie partage avec les États-Unis...).
Au-delà du côté sensationnel, rappelons tout d'abord quelques faits historiques concernant ce pays avant d'écouter le rappeur-slameur K'Naan. (Si vous souhaitez accéder directement à la suite, cliquez sur la partie qui vous intéresse) :


Un pays en miettes

La Somalie a une certaine unité de langue, de culture et de religion (l'islam sunnite, fortement marqué par le soufisme). Des Somalis se trouvent même à Djibouti, au Kenya et en Éthiopie (Ogaden). Les divisions du pays sont donc claniques et non ethniques. Cinq clans familiaux très larges se répartissent sur les territoires peuplés de Somalis. Pourtant, il n'y a jamais d'État unifié avant la colonisation.

Au XIXème siècle, les Égyptiens (qui s'intéressent au "Pays de Punt"), les Éthiopiens et surtout les Italiens, les Français et les Britanniques tentent d'étendre leur domination sur la "Corne de l'Afrique". Les Européens vont se partager cet espace : les Italiens (en s'y reprenant à deux fois, en 1896 où ils connaissent la terrible défaite d'Adoua puis en 1935 avec les grands moyens) obtiennent l'Ethiopie (et avec elle l'Erythrée) et une partie de la Somalie, les Britanniques l'autre partie de la Somalie et les Français le petit territoire qui forme aujourd'hui Djibouti. [Carte ci-contre : La Corne de l'Afrique et le Golfe d'Aden en 1939]

Après la Seconde Guerre mondiale, l'Ethiopie recouvre son indépendance et la Somalie italienne est provisoirement sous tutelle. Elle accède à l'indépendance en 1960 et fusionne avec la Somalie britannique, elle aussi émancipée. Les premières années qui suivent l'indépendance sont plutôt prometteuses pour le pays. Pendant la guerre froide, la Somalie penche d'abord du côté occidental, les États-Unis prenant la place du Royaume-Uni dans le Golfe d'Aden. Le pays a déjà des revendications sur les territoires des pays voisins peuplés de Somalis (Kenya et Ethiopie).

[La Corne de l'Afrique et le Golfe d'Aden en 1970]

1969 Le général Siyad Barré s'empare du pouvoir à Mogadiscio et se tourne vers Moscou. L'URSS installe une base à Berbera sur le Golfe d'Aden, non loin du détroit de Bab El-Mandeb qui commande le passage vers la Mer Rouge. Mais les rivalités avec l'Ethiopie, malgré son entrée dans le camp communiste en 1977 (avec l'arrivée au pouvoir de Mengistu qui chasse le Negus), entraînent une guerre à propos de l'Ogaden en 1977-1978. Le choix de l'Ethiopie par l'URSS précipite la défaite somalienne et fait retomber la Somalie vers le camp occidental dès 1978. Les Soviétiques quittent Berbera pour les îles de Dahlak au large de l'Ethiopie. La base de Berbera est concédée aux États-Unis qui soutiennent désormais le pays. Les tensions et affrontements persistants avec l'Ethiopie (une paix est finalement signée en 1988) poussent vers la Somalie de nombreux réfugiés venus de l'Ogaden. Dans toute la Corne, la famine fait des ravages en 1983-1984. La Somalie, comme l'Ethiopie, n'est pas épargnée.

[La situation géopolitique dans la région en 1980]

Les années 1980 voient donc la situation politique et sociale se dégrader lentement. Les clans tentent de contrôler des parcelles plus importantes de pouvoir, notamment en s'armant. Face aux velléités indépendantistes du Somaliland, où son opposition est bien implantée, Siyad Barré utilise la manière forte. Les tensions s'accumulent et poussent le pays vers la guerre civile. En janvier 1991, Siyad Barré, après une violente résistance dans la capitale, est contraint de s'enfuir. C'est le début d'une longue période d'anarchie pour le pays. Différents clans s'affrontent pour le pouvoir, dont celui de Mohammed Farah Aïdid qui est à la tête de l'État.
Les États-Unis et la communauté internationale, longtemps accaparés par la Guerre du Golfe, décident finalement d'intervenir en décembre 1992. Georges Bush Sr., prédicateur du "nouvel ordre mondial", lance l'opération Restore Hope(restaurer l'espoir) avec près de 30 000 soldats sous mandat de l'ONU. Mais les affrontements ne cessent pas et les milices s'en prennent aux troupes américaines lors de scènes de guérilla urbaine très médiatisées. Des soldats américains sont capturés et mutilés ce qui traumatise l'opinion publique aux États-Unis (c'est le sujet abordé par le film La chute du Faucon Noir de Riddley Scott, 2002). C'est donc l'échec pour cette première intervention faite au nom du "droit d'ingérence humanitaire" qui va dissuader pendant longtemps toute intervention en Somalie. Les troupes américaines sont retirées et la mission de l'ONU (ONISOM) redevient strictement humanitaire même si des casques bleus sont présents jusqu'en 1995.

La Somalie est dès lors morcelée en territoires plus ou moins vastes, contrôlés notamment par des chefs de guerre. Certains de ces territoires comme le Somaliland (autoproclamé indépendant en 1991) et le Puntland (qui a délcaré son autonomie en 1998) deviennent même des États quasi-indépendants qui disposent de tous les attributs de la souveraineté sans toutefois être reconnus par l'ONU. Des accords signés le plus souvent à l'étranger (au Kenya ou à Djibouti notamment) envisagent une sortie de la guerre civile. Un premier Gouvernement fédéral de transition (GFT) a été désigné en 2000 avec à sa tête le dirigeant du Puntland Abdullahi Yusuf. Mais le maintien de l'insécurité à Mogadiscio a empêché qu'il s'installe dans la capitale. L'islamisme rigoriste, pourtant peu en phase avec une pratique soufie de l'islam, a progressé dans le pays pendant les années 1990. En 2006, les milices des Tribunaux islamiques ont pris le pouvoir avant d'être renversées par l'armée éthiopienne qui a réinstallé le GFT au pouvoir en 2007 (avec l'assentiment des Etats-Unis). Mais cette intervention du pays voisin, majoritairement chrétien de surcroît, a entrainé une réaction des nationalistes (encouragés par l'Erythrée), pour une fois d'accord avec les islamistes. Un accord est de nouveau trouvé à Djibouti en 2008 entre le GFT et certains islamistes jugés "modérés" (quitte à être idéalisés), mais qui écarte d'autres mouvements jugés trop extrémistes (et quant à eux diabolisés). En janvier2009, suite à cet accord, l'ancien dirigeant des Tribunaux islamiques Sheikh Sharif Ahmed a été désigné président et les troupes éthipiennes ont quitté le pays. Mais de nombreuses oppositions subsistent, le plus souvent armées comme celle des Shebab (les jeunes en arabe), plus radicaux que leurs prédécesseurs des tribunaux islamiques. Les affrontements continuent, en particulier dans le sud et l'autorité de l'Etat est encore loin d'être reconnue par tous ce qui laisse la place à toutes les aventures. Seul le Somaliland semble échapper à cette anarchie et fonctionner comme un véritable Etat souverain. Les autorités du Puntland sont régulièrement accusées de favoriser la piraterie dont elles tireraient profit.

[Toutes les cartes de cette première partie réalisées par E. Augris, D.R.]


Pourquoi la piraterie ?

La question de la piraterie maritime est revenue sur le devant de la scène depuis 2008 avec l'augmentation des abordages au large de la Somalie. Voyez ci-dessus une image satellite du supertanker saoudien Sirius Star au large des côtes au main de pirates en novembre 2008 [source de l'image].

[Carte des actes de piraterie recensés entre janvier et novembre 2009]

Les actes de piraterie ont en effet considérablement augmenté dans le secteur de la mer d'Oman et du Golfe d'Aden depuis 2005. En nombre d'actes, la zone a ainsi dépassé les zones traditionnelles de piraterie comme le détroit de Malacca, voie de passage stratégique du pétrole du Moyen Orient vers l'Asie orientale entre Indonésie, Malaisie et Singapour où de nombreuses îles constituent des caches très commodes pour les pirates. C'est aussi l'un des axes majeurs du transport maritime de conteneurs entre l'Asie et l'Europe.


Si l'on se rapproche de la Somalie (carte ci-dessus, toujours de janvier à novembre 2009), on voit que l'essentiel des actes se produisent dans le Golfe d'Aden mais aussi dans l'Océan Indien, de plus en plus loin des côtes somaliennes.

Comment expliquer cette augmentation ? Il y a bien sûr la déliquescence de l'Etat somalien depuis 1991 que je viens d'évoquer. Cette situation ne s'est pas améliorée avec la partition de fait du pays. Seul le Somaliland parvient à empêcher la piraterie depuis ses côtes. Par contre, les autorités de la province autonome du Puntland ne la dissuadent pas et semblent au contraire l'encourager. A cette absence d'autorité de l'État s'ajoutent des difficultés économiques et sociales qui apparaissent comme des facteurs déclenchant. La pêche a toujours été une activité importante pour les habitants des côtes somaliennes. A la fin de la période Siyad Barré, les entreprises de pêche industrielle des pays développés se sont accaparées les zones de pêche somaliennes, le plus souvent avec l'accord d'autorités y voyant un moyen de s'enrichir. Les pêcheurs somaliens n'ont pas eu le moyen de lutter contre cette concurrence des navires-usines. Leur connaissance de la mer les a alors parfois poussé vers la piraterie. Éric Frecon (voir sources) estime que les gains des compagnies occidentales se sont élevés à 300 millions de $ en 2008 (contre une estimation de 100 millions pour les rançons obtenues par les pirates). Le port d'Eyl, aujourd'hui l'une des principales bases des pirates, était auparavant l'un des principaux ports de pêche. La piraterie est donc devenue une opportunité intéressante pour ceux qui ne souhaitaient pas émigrer vers les côtes du Yémen où se multiplient les camps de réfugiés somaliens. En 2008, 700 personnes sont mortes en tentant de traverser le Golfe d'Aden soit 700 fois plus que le nombre de morts causés par la piraterie...
Autre évènement aggravant, le Tsunami de 2004 qui a également touché les côtes somaliennes, en particulier les pêcheurs et leurs bateaux. Il faut ajouter à cela la forte probabilité (soulignée par K'Naan) que de nombreux navires occidentaux viennent abandonner leurs déchets toxiques (nucléaires en particulier) dans les eaux territoriales somaliennes, suscitant des réactions violentes de la part des pêcheurs, décidés à s'armer pour l'empêcher.
Concernant les liens supposés avec le terrorisme islamiste, Alain Gascon (voir sources) écrit que "les pirates sont moins des émules de Ben Laden que des pêcheurs ruinés par la guerre et par le pillage de leur ressource".

Il convient donc évidemment de lutter contre la piraterie qui relève de la criminalité, mais sans perdre de vue qu'elle ne disparaîtra qu'une fois améliorées les conditions politiques, économiques et sociales qui ont conduit de plus en plus de jeunes Somaliens à se tourner vers elle.


Un "philosophe aux pieds-nus" pour comprendre


Mais place à la musique. Si j'ai choisi de vous parler de la Somalie, c'est parce que c'est le pays d'origine du rappeur K'Naan. Retraçons son parcours.
Keynaan Cabdi Warsame est né en 1978 dans le quartier putôt tranquille de Wardhiigleey àMogadiscio, la capitale somalienne. Son prénom signifie "voyageur". Sur son berceau, les muses se sont tôt penchées puisque son grand-père est poète, qu'une de ses tantes,Magool, est une chanteuse connue dans le pays. Il grandit pendant les années 1980 dans une relative insouciance. Mais la dégradation de la situation politique, au début des années 1990, fait de son quartier une "rivière de sang". La guerre devient son quotidien. Son père est déjà à New York comme chauffeur de taxi lorsque sa mère réussit à obtenir des visas pour sa famille, juste avant la fermeture de l'ambassade des Etats-Unis en Somalie. Kaynaan fuit donc son pays en 1991. La famille s'installe à Harlem puis ensuite à Torontoau Canada, dans la "Liitle Mogadiscio" du quartier de Dixon où vivent 25 000 Somaliens. Il apprend l'anglais et découvre le rap auquel il trouve des points communs avec la poésie orale somalienne qui l'a très tôt bercé. A Toronto, il fait partie d'un gang et tâte même de la prison pour violences et détention d'armes. Mais le hip-hop est pour lui une planche de salut.
En 1999, il est engagé par le HCR et participe à un spectacle. En utilisant le slam, il critique la politique de l'ONU en Somalie. Il est repéré par le chanteur sénégalais Yousssou N'Dour qui le fait participer à une tournée. De fil en aiguille, il en arrive à la production de son premier album qui le consacre "philosophe aux pieds-nus", The Dusty Foot Philosopher en 2005. L'album est un succès. Il récidive en 2009 avec Troubadour pour lequel il a travaillé avec les fils de Bob Marley, Damian et Steven. Par sa musique, il mêle le hip-hop et des sonorités peu communes parce qu'influencées par son enfance somalienne. Dans son albumTroubadour, il sample également beaucoup des mélodies éthiopiennes des années 1970, (Mulatu Astatke, Alemayehu Eshete, Getatchew Mekurya) au moment de la libéralisation relative du régime du Négus, avant que le "Negus rouge" Mengistu ne referme la parenthèse à partir de 1974 (pour écouter ces musiques, je vous conseille la superbe série de rééditions "Ethiopiques" pilotée par Francis Falceto pour Buda musique). Par ses paroles, il invite à la compréhension de la complexité du monde, en particulier de son pays d'origine, la Somalie. Un peu à contre-courant du sensationnalisme des médias et de la célébration des héros américains libérés des pirates, il invite alors régulièrement les sociétés occidentales à ne pas occulter les racines du mal qui conduisent des pêcheurs à devenir pirates. Il parle ainsi dans de nombreux entretiens des origines de la piraterie en Somalie. Pour lui, les pêcheurs, privés de leur poisson et voyant des bateaux jeter en mer des cargaisons de déchets toxiques, ont d'abord voulu se défendre. Il souhaite que, pour mettre fin à la piraterie la lutte contre la pauvreté devienne une priorité et pas seulement l'utilisation de la force. Dans sa chanson "Somalia" (comme dans beaucoup d'autres, voyez une sélection à la fin de cet article), il invite à cette réflexion en décrivant la dureté des conditions de survie des jeunes Somaliens.

Signalons pour terminer sur K'Naan qu'il a récemment fait un featuring sur un titre d'Oxmo Puccino ("L'arme de paix") et qu'il vient de sortir une mixtape (téléchargeable gratuitement et légalement ici) avec Jay Period dans laquelle il rend hommage à Fela Kuti, Bob Marley et Bob Dylan. K'Naan devrait voir accroître sa renommée d'ici juin 2010. Son titre "Wavin' Flag" vient d'être choisi comme hymne officiel de la Coupe du Monde (info fournie par J.B.).




J'ai essayé de bricoler une traduction dont je ne suis pas pleinement satisfait, n'hésitez pas à me faire des suggestions :

Uh,
Yeah,
Somalia

Yeah,
I spit it for my block, Je le débite pour mon quartier
It's an ode, I admit it. C'est une ode, je l'avoue
Here the city code is lock and load Ici le code postal est tiens-toi prêt (lock & load : référence au fait de charger et de verouiller une arme)
Any minute is rock and roll chaque minute est rock n' roll
And you rock and roll, et tu bouges et roule
And feel your soul leavin'. Et sent ton âme partir
It's just the wrong dance C'est juste la mauvais danse
That'll leave you not breathin'. Qui ne va pas te laisser respirer
I'm not particularly proud Je ne suis pas particulièrement fier
Of this predicament but, de cette situation difficile mais
I'm born and bred Je suis né et j'ai grandi
In this tenement, I'm sentimental, What?! Dans ce taudis, Je suis sentimental, Quoi ?!
Plus it's only right to represent my hood Et en plus, c'est bien de représenter mon quartier
And what not. Et pourquoi pas [?]
So I'm about to do it in the music; in the movies. Donc je vais le faire en musique; dans les films.
Cut to the chase pan across to the face [?]
I'm right there. Je suis juste là-bas
Freeze frame on the street name Arrête le cadrage sur le nom de la rue
Oops wait a minute, Oups, attends une minute
This is where the streets have no name Ici les rues n'ont pas de nom
And the drain of sewage. Ni de canalisations d'eaux usées.
You can see it in this boy how the hate is brewin' Tu peux voir dans ce garçon comment la haine se mijote
Cause when his tummy tucks in Parce que lorsque son estomac se remplit
f**k the pain is fluid. Putain la douleur est liquide
So what difference does it make, Alors quelle différence cela fait-il
Entertaining threw it. L'amusement l'a jeté à terre
Some get high mixing coke and gun powder, sniffin'. Quelques uns s'envoient en l'air en mélangeant de la coke et de la poudre de revolver
She got a gun but could have been a model or physician. Elle a eu une arme mais aurait pu devenir mannequin ou médecin

So what you know bout the pirates terrorize the ocean. Donc ce que tu sais à propos des pirates que terrorisent les océans
To never know a simple day without a big commotion. Pour ne pas connaître un seul jour sans une grande agitation
It can't be healthy just to live with a such steep emotion. Cela ne peux pas être sain de vivre simplement pour vivre avec une émotion aussi forte
And when I try and sleep, I see coffins closin'. (Repeat) Et quand j'essaie et que je m'endors, Je vois des cercueils se fermer.

Yeah,
Yeah,
We used to take barb wire Nous avions l'habitude de prendre des fils de fer barbelés
Mold them around discarded bike tires. De les façonner autour de pneus de vélos abandonnés
Roll' em down the hill in foot blazin'. De les faire rouler en feu en bas de la pente, à pied
Now that was our version of mountain bike racing C'était notre version de la course de VTT
Daammn! Mince !
Do you see why it's amazing, Tu vois pourquoi c'est sensationnel,
When someone comes out of such a dire situation Lorsque quelqu'un réussit à se sortir d'une situation aussi terrible
And learns the English language, Et apprend l'anglais
Just to share his observation! Juste pour faire partager cette observation !
Probably get a Grammy without a grammar education. Réussit peut être à obtenir un Grammy [récompense musicale] sans éducation primaire [jeu de mot avec "grammar education" et grammy]
So f**k you school and f**k you immigration! Alors va te faire foutre l'école et va te faire foutre l'immigration ! [Probablement les services de l'immigration]
And all of you who thought I wouldn't amount to constipation. Et tous ceux d'entre vous qui pensaient que je n'atteindrai pas la constipation. [?]
And now I'm here without the slightest fear and preservation, Et maintenant je suis ici sans la plus moindre crainte ni conservation [?]
They love me in the slums and in the native reservations. Ils m'aiment dans les bidonvilles et dans les réserves d'indigènes
The world is a ghetto with ministerin' deprivation. Le monde est un ghetto avec une privation secourante [?]
My mommy didn't raise no fool did she hooyo? Ma maman a pas élevé d'imbécile, n'est-ce pas ?
I promise I would get it and remain strictly loyal. Je promets que je m'y tiendrais et resterais strictement loyal.
Cause when they get it then they let it all switch and spoil. Parce que lorsqu'ils l'attrappent ils le laissent changé et dépouillé
But I just illuminated it like kitchen foil. Mais je l'ai simplement illuminé comme du papier aluminium
A lot of main stream niggas is yappin' about yappin' Beaucoup de niggas communs jacassent pour jacasser
A lot of underground niggas is rappin' about rappin'. Beaucoup de niggas underground rappent pour rapper
I just wanna tell you what's really crackalackan Je veux juste vous dire ce qui se passe réellement
Before the tears came down this is what happened. Avant que les larmes ne coulent, voici ce qui est arrivé

So what you know bout the pirates terrorize the ocean. Donc ce que tu sais à propos des pirates que terrorisent les océans
To never know a simple day without a big commotion. Pour ne pas connaître un seul jour sans une grande agitation
It can't be healthy just to live with a such steep emotion. Cela ne peux pas être sain de vivre simplement pour vivre avec une émotion aussi forte
And when I try and sleep, I see coffins closin'. (Repeat) Et quand j'essaie et que je m'endors, Je vois des cercueils se fermer.



Murs et frontières entre hier et aujourd'hui



Sujets épreuves du bac 2010

Surprise ! En 2010, la partie "majeure" de l'épreuve d'histoire-géo du bac était partagée, histoire pour les L/ES, géo pour les S. Voici les sujets sur lesquels ont planché les lycéens des sections générales pendant 4 heures ce matin...

Séries L et ES

Epreuve majeure, Histoire

Il fallait traiter l'un de ces trois sujets au choix.

- Composition : « Le Tiers-Monde : indépendances et tentatives d’organisation (1945-fin des années 1980) »

- Composition :« Les démocraties populaires et leurs évolutions (1948-1989) »

- Etude d'un ensemble documentaire : « Comment ont évolué les mémoires de la Seconde Guerre mondiale en France depuis 1945 ? »

Etudes de documents, Géographie

Il fallait expliquer l'un de ces deux documents au choix, à partir de questions associées à chaque document.

Document 1 : Croquis : « L’organisation de l’Europe rhénane »

Document 2 : « La Russie : un territoire inégalement peuplé et mis en valeur »

Série S

Epreuve majeure, Géographie

Il fallait traiter l'un de ces trois sujets au choix.

- Composition : « La superpuissance des Etats-Unis et ses manifestations dans l’espace mondial »

- Composition : « La mégalopole japonaise »

- Etude d'un ensemble documentaire : « L’interface méditerranéenne : quels effets sur les littoraux des pays du Sud et de l’Est de la Méditerranée (PSEM) ? »

Etudes de documents, Histoire

Il fallait expliquer l'un de ces deux documents au choix, à partir de questions associées à chaque document.

Document 1 : « Une analyse de la situation internationale de 1945 à 1985 »

Document 2 : « Analyse d'un publicité du comité économique et social du Centre-Ouest (CESCO), 1962-1963 »

Découvrez tout de suite les sujets sur lequels les candidats de STG ont planché...

PREMIÈRE PARTIE

Questions d’histoire
1 ) Les cinq événements indiqués ci-dessous se rapportent tous à la période du monde
bipolaire. Donnez l'année de quatre d'entre eux. (2 points)
- création des deux Allemagne
- effondrement du mur de Berlin
- doctrine Truman
- éclatement de l'URSS
- plan Marshall.
2 ) Citez deux acteurs du pouvoir législatif en France sous la cinquième République.
(2 points)
3 ) Complétez la légende de la carte en annexe page 9/9. (1 point)
Questions de géographie
4 ) Caractérisez les flux migratoires dans l'espace mondial. (2 points)
5 ) Proposez une définition de la notion de pôle. (1 point)
6 ) « La permanence des aires de civilisation est un acteur de différenciation de l'espace
mondial. »
Choisissez deux arguments pour justifier cette affirmation : (2 points)
- l'anglais est la première langue de communication
- les grandes entreprises multinationales doivent adapter leurs produits aux goûts
des différentes populations
- le football est pratiqué dans le monde entier
- des milliers de langues sont parlées dans le monde

- toutes les agglomérations du monde ont des quartiers d'affaires identiques.

SECONDE PARTIE

Exercice n° 1 : sujet d’étude : La santé
Questions :
1 ) Quels regroupements d’Etats peut-on établir au regard de l’espérance de vie ?
2 ) Quelles sont, d'après le document, les caractéristiques des Etats les plus développés ?
3 ) Quels éléments du tableau permettent d'expliquer la faiblesse de l’espérance de vie en
Afrique australe (Afrique du Sud, Botswana, Zambie, Zimbabwe) ?
4 ) Montrez, à l'aide des données du tableau, que la mortalité infantile des différents Etats
est liée aux conditions sanitaires des populations.
5 ) Pourquoi peut-on dire que la santé est révélatrice des différences de développement ?


Exercice n° 2 : sujet d’étude : L’éducation.
Questions :
1 ) Présentez de manière précise les deux documents.
2 ) Quelles sont les principales inégalités en termes d’analphabétisme entre les pays du
bassin méditerranéen ? (document 1)
3 ) Identifiez les acteurs intervenant dans la lutte contre l’illettrisme. (document 2)
4 ) Analysez la situation de la France en matière d'analphabétisme et d'illettrisme en justifiant
votre réponse. (documents 1 et 2)
5 ) Montrez que l'éducation est un enjeu du développement.

Exercice n° 3 : sujet d’étude : L’Algérie à partir de 1954
Questions :
1 ) Présentez le document (nature, auteur, date et contexte).
2 ) Quels objectifs Boumediene espère-t-il atteindre ?
3 ) Relevez les moyens évoqués pour parvenir à ces objectifs.
4 ) Expliquez la phrase soulignée.
5 ) En quoi ce document permet-il d’illustrer les choix de l’Algérie en matière de
développement ?

Exercice n° 4 : sujet d’étude : L’Inde à partir de 1947
Questions
1 ) Dégagez les caractéristiques de la politique économique menée par Nehru. (document 1)
2 ) Relevez dans le document 2 un élément montrant l’intégration de l’Inde dans la
mondialisation.
3 ) Expliquez la phrase soulignée dans le document 1 à l’aide du document 2.
4 ) Quelles sont les limites des politiques de développement menées en Inde .
(documents 1 et 2)
5 ) Montrez en quoi ces deux documents illustrent l’évolution des choix de l’Inde en
matière de politique de développement depuis les années 1950. (documents 1 et 2)


sujets de Pondichéry 2010

http://pedagogie.ac-toulouse.fr/lyc-francais-pondichery/espaceprofs/sujetbac/Bacpondy2010/index.html

L'ALENA

L'Accord de Libre Echange Nord Américain (ou North American Free Trade Exchange) a marqué la naissance d'une zone de libre échange commerciale entre le Canada, les Etats-Unis et le Mexique. Ce traité, signé en 1992 et rentré en vigueur le 1er janvier 1994 devait être le début d'un projet plus vaste visant à créer un large espace commercial sur l' ensemble du continent américain pour concurrencer l'Union Européenne qui à cette époque s'affirmait avec le traité de Maastricht.



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Ce traité de libre échange s'inspire d'un accord déjà existant depuis 1989 entre le Canada et les Etats-Unis. Par contre, contrairement aux institutions européennes, il est purement commercial et ne vise aucunement à créer un pouvoir politique ou des lois communes en dehors d'accords marchands. Il s'agit en fait ici de faciliter les échanges et d'éviter les litiges économiques entre les trois pays.

L'article 102 de l'ALENA pose les principes suivants entre les Parties c'est à dire les pays concernés:

" Les objectifs du présent accord,(...) sont les suivants :

a) éliminer les obstacles au commerce des produits et des services entre les territoires des Parties et faciliter le mouvement transfrontalier de ces produits et services;

b) favoriser la concurrence loyale dans la zone de libre-échange;

c) augmenter substantiellement les possibilités d'investissement sur les territoires des Parties;

d) assurer de façon efficace et suffisante la protection et le respect des droits de propriété intellectuelle sur le territoire de chacune des Parties;

e) établir des procédures efficaces pour la mise en oeuvre et l'application du présent accord, pour son administration conjointe et pour le règlement des différends; et

f) créer le cadre d'une coopération trilatérale, régionale et multilatérale plus poussée afin d'accroître et d'élargir les avantages découlant du présent accord. "

Les trois pays membres ont ainsi demantelé leurs barrières économiques au nom du libre échange en supprimant les droits de douanes et en clarifiant et harmonisant leur droit commercial. Par contre, contrairement à l'Europe, la libre circulation ne s'applique qu'aux marchandises, pas aux personnes. S'il n'y a plus de séparation physique entre le Canada et les Etats-Unis qui ont le même niveau de vie, la frontière n'a cessée de se renforcer avec le Mexique, pays du Sud, pour empécher une immigration massive.

De nombreuses entreprises américaines ou canadiennes se sont délocalisées à la frontière mexicaine pour profiter d'une main d'oeuvre bon marché dans ce qu'on appelle les usines "maquiladoras". Des usines de montage destinées au marché des pays riches mais profitant d'ouvriers "latinos" en moyenne sept fois moins chers que leurs homologues "gringos".

TopTradingPartners.gifLa croissance économique a été forte pour toute la région et les trois pays en ont largement profité pour doper leurs échanges. Des échanges qui atteignent 946 milliards de dollars en 2008 soit un triplement depuis 1994.Comme on le voit sur ce graphique des partenaires économiques des Etats-Unis en 2004, le Canada et le Mexique représentent 30% du commerce. Le Mexique lui même a globalement profité de ces emplois nouveaux et de l'afflux d'investissements venus du Nord et a vu son économie s'accroître considérablement. Face à la constitution de grands ensembles économiques, comme l' Union Européenne ou l' ASEAN, c'est aussi le moyen pour les pays américains de ne pas se retrouver isolés dans la compétition économique internationale.

Mais de nombreuses critiques sont aussi venues remettre en cause ce projet. D'abord il n'est qu'économique. On est encore loin de voir la frontière Sud des Etats-Unis s'ouvrir aux flots de migrants qui rêvent de tenter leur chance au delà du Rio Grande (ou Rio Bravo comme on dit au Mexique). On a même vu le mur de séparation à la frontière et les "border patrols" se renforcer. Les camions passent, pas les hommes (en tout cas dans le sens Sud-Nord) comme le
chante Lila Downs.

laborday.gifL'enrichissement n'a pas profité à tout le monde que ce soit au Mexique ou aux Etats-Unis et a surtout été bénéfique pour les dirigeants et les actionnaires. On a même vu se créer une compétition aux bas salaires entre les villes mexicaines pour attirer les sociétés du Nord.Les petits paysans et artisans mexicains n'ont pas pu résister à l'arrivée à bas prix des produits agricoles étatsuniens et canadiens et ont été ruinés. Aux Etats-Unis et au Canada, les pertes ont été grandes pour l'emploi industriel,en effet de nombreuses entreprises en ont profité pour se délocaliser au Mexique mettant du monde au chômage. Une question qui revient régulièrement lors des campagnes électorales. L'un des paradoxes de ce système fait qu'au final les Etats-Unis importent plus qu'ils n'exportent du Canada et du Mexique aggravant leur déficit commercial. Mais un déficit apparent car si les produits sont fabriqués au Mexique, ils appartiennent à des entreprises américaines. Dernier reproche majeur de nombreuses entreprises polluantes ont profité d'une législation beaucoup moins contraignante sur les normes anti pollution au Mexique et s'y sont installées pour polluer tranquillement. (image :"Usine américaine. Sur l'affiche : Fête du travail : cette année le pique-nique aura lieu au Mexique où votre boulot est parti")

En fait si globalement l'ALENA a été très positif économiquement, il a aussi amplifié les inégalités sociales au Mexique ainsi que sa dépendance notamment financière auprès des Etats-Unis. Les heurts de la crise de 2008 ont touché par contrecoup l'économie du Mexique qui a vu son chômage bondir.

Carte1mDans la foulée, les Etats-Unis ont essayé d'initier la ZLEA (Zone de Libre Echange des Amériques), cette fois ci étendu sur tout le continent de "l'Alaska à la Terre de Feu" selon l'expression du président George H. Bush (le père) au début des années 90. Malgré les appels du pied des Etats-Unis, les autres pays d'Amérique Latine ne sont pas très enthousiastes à l'idée de rejoindre un hypothétique marché commun américain sur le modèle de l'ALENA. Il existe déjà d'autres accords de ce type en Amérique dont le principal, initié par le Brésil et l'Argentine, s'appelle le MERCOSUR, qui vise à une plus grande coopération sur le modèle européen et se méfie des ambitions américaines. La ZLEA qui devait démarrer en 2005 est restée au point mort et se heurte à la méfiance des grands pays d'Amérique du Sud. Un projet mort et enterré a même déclaré le premier ministre canadien Stephen Harper en mai 2009.



Pour compléter :

Le site officiel Alenaaujourd'hui.org produit par les trois pays signataires vante les réussites de cet accord.

Le site officiel du secrétariat de l'ALENA (en trois langues, anglais, espagnol et, Canada oblige, en français.). Intéressant avec notamment de nombreux textes expliquant le fonctionnement de cette association mais un peu aride à parcourir.

Un article du journal proche des altermondialistes "Le Monde Diplomatique" qui dénonce
les effets destructeurs de l'ALENA sur les petits paysans mexicains.

Un dossier très riche d'Etienne Augris sur la frontière américano-méxicaine

Sur le Mercosur, le très riche Atlas du Mercosur en ligne qui détaille ce projet dont nous reparlerons ici bientôt.

nafta cartoon
(Caricature anti ALENA :
Au centre: société américaine qui tient dans ses mains l'ALENA et l'
OMC (WTO): "Enfin le libre échange, enfin le libre échange, merci Dieu tout puissant nous avons le libre échange"
A gauche : travailleurs américains : licenciement massifs, disparition des droits des travailleurs"
A droite: travailleurs étrangers: "payes d'esclaves, pas de droits du travail")

L'Asie orientale

1er janvier 2010 : Création d'une zone de libre-échange en Asie


Parmi les nouveautés de ce début d'année, une zone de libre-échange en Asie. Après l'Union Européenne, l'exemple le plus poussé d'intégration, et l'ALENA, la troisième plus importante zone vient d'être créée par les dix pays de l'ASEAN et la Chine.

Qu'est-ce que l'ASEAN ?

Créée pendant la guerre froide, en 1967, pour rassembler les alliés des États-Unis et empêcher le communisme de progresser (selon la fameuse "théorie des dominos"), l'association des nations d'Asie du Sud-Est connaît depuis les années 1990 un nouvel essor. Si elle ne s'interdit pas de traiter de politique, l'association est clairement orientée vers les questions économiques. D'ailleurs, elle rassemble des pays aux systèmes politiques très différents puisque des pays communistes l'ont rejoint (comme le Vietnam). La Thaïlande, la Malaisie, l'Indonésie, Singapour et les Philippines sont ses 5 membres fondateurs en 1967. Le sultanat de Bruneï a rejoint l'ASEAN après son indépendance en 1984. En 1995 et 1997, deux pays officiellement communistes, le Vietnam et le Laos ont adhéré. Puis ce fut le tour de la Birmanie (ou Myanmar) en 1997 et du Cambodgeen 1999.

Que prévoit l'accord de libre-échange ?

Prévue par un traité signé en 2002, une zone de libre-échange est créée. 90% des droits de douanes y sont donc supprimés. Elle doit rassembler dix pays de l'ASEAN et la Chine populaire et inclut 1,9 milliards de personnes. Les échanges commerciaux entre tous ces pays ont déjà connu une augmentation importante, en parallèle et sans doute à cause du développement de l'Asie du Sud-Est. D'ailleurs, elle va faire disparaître des barrières douanières déjà relativement peu élevées (5% pour la plupart).
Pour le moment, seuls six pays de l'ASEAN participent à la zone de libre-échange (Indonésie, Philippines, Thaïlande, Malaisie, Singapour, Brunei). Le Cambodge, le Vietnam, le Laos et le Myanmar (Birmanie), membres plus récents de l'ASEAN, devraient rejoindre la zone d'ici 2015.

Quels seront les effets de cette zone de libre-échange ?

Contrairement à l'Europe et l'Amérique du Nord, la création d'une zone de libre-échange suscite assez peu de critiques. Même si certains, à l'image des industriels du textile en Indonésie, craignent une invasion du Made in China. Les échanges entre l'ASEAN et la Chine sont déjà déficitaires (voir graphique ci-contre, source NYT). La Chine est, après le Japon et l'UE, le troisième partenaire commercial de l'ASEAN, devant les Etats-Unis.
Les effets de cette ouverture devraient varier selon les pays. Singapour, la Malaisie et la Thaïlande ont des échanges légèrement déficitaires. La Malaisie, qui exporte du pétrole, du gaz naturel et du caoutchouc vers la Chine, devrait profiter de l'ouverture du marché chinois. Le Vietnam voit son déficit se creuser, cela pourrait s'aggraver puisque le pays a des productions à faible valeur ajoutée en concurrence directe avec les productions chinoises. D'un autre côté, les pays d'Asie du Sud-Est pourraient concurrencer la production agricole chinoise, en particulier le Cambodge.

Bref, comme partout ailleurs, l'ouverture d'une telle zone de libre-échange devrait renforcer l'intégration régionale, relativement modeste pour le moment, faire des heureux et des laissés-pour-comptes. La mise en concurrence de tous ces espaces très divers crééra sans doute une dynamique positive mais devrait aussi développer certaines inégalités à différentes échelles, entre villes et campagnes, entre espaces bien intégrés à la logique de mondialisation et espaces marginalisés par ce même processus. L'ouverture des économies et des sociétés d'Asie du Sud-Est trouvera donc logiquement ses détracteurs et ses partisans.

La Chine populaire a pris de l'avance dans la région avec la création de cette zone, nul doute que cela va intéresser les autres puissances économiques que sont la Corée du Sud, Taïwan et surtout le Japon.

lundi 28 mars 2011

Sujet d'étude STG la Chine

Sujet d’étude : la Chine
Un pays communiste qui s’est ouvert au marchés mondiaux
La Chine est communiste depuis 1949 : l’état possède et contrôle. Dans les années 80, après la mort de Mao Zedong, le nouveau dirigeant Deng Xiao Ping, tout en maintenant un régime politique communiste autoritaire a engagé des réformes économiques destinées à ouvrir la Chine au capitalisme mondial. Des FTN étrangères se sont installées sur les littoraux (dans les ZES) pour profiter d’une main-d’œuvre peu couteuse et disciplinée et d’avantages fiscaux intéressants. La Chine est devenue le 3° pôle commercial du monde (derrière Etats-Unis et Union Européenne). Sa façade maritime est la plus dynamique du monde : sur les 10 premiers ports mondiaux 6 sont chinois, dont le 1er, Shanghai.
Une superpuissance mondiale en devenir ?
La puissance chinoise présente 3 visages actuellement :
 une puissance économique fondée sur une croissance vertigineuse : + 9 % par an ! Cette puissance économique repose sur les biens de consommation courants (la Chine est « l’atelier du monde ») mais de plus en plus sur la haute-technologie comme le montre le vol en 2000 du 1er Taïkonaute. Cette puissance se mondialise : outre la Triade, la Chine étend sa puissance en Asie et en Afrique
 une puissance politique montante fondée sur la taille du pays (9,6 millions de km²), son poids
démographique (1,3 milliard d’habitants), sa puissance militaire (la Chine dispose de l’armeatomique) et sa présence forte à l’ONU
 une puissance culturelle naissante reposant sur les millions de chinois installés dans le monde (diaspora) avec 2 signes forts : le développement des instituts Confucius et les JO de Beijing en 2008.
Une Chine à plusieurs vitesses
La Chine littorale, interface avec le monde, est le cœur de cette puissance : peuplée, en plein développement, urbanisée… La Chine intermédiaire, plus agricole, commence à rattraper son retard avec des villes comme Wuhan. Par contre la Chine intérieure reste rurale et très en retard de développement : elle est un réservoir de main-d’œuvre pour les littoraux.
La Chine reste un pays du Tiers Monde par son niveau encore bas de développement, mais les inégalités sociales se creusent, surtout entre les citadins, plus riches, et les ruraux. Un exode rural massif draine des millions de paysans vers les villes dans lesquelles ils sont confronté à de très gros problèmes d’emploi, de logement et de misère.
La croissance chinoise est fragile car elle dépend beaucoup des ressources importées et elle génère une forte pollution. De plus les menaces de désordres sociaux sont élevées. Enfin la croissance de la population ayant été limitée grâce à la politique de l’enfant unique il risque de se poser un gros problème de vieillissement.
Notions et vocabulaire
ATELIER DU MONDE : cette expression désigne l’énorme importance des usines de montage et assemblage en Chine.
INSTITUT CONFUCIUS : centres culturels chinois à l’étranger.
POLITIQUE DE L’’ENFANT UNIQUE : lancée à la fin des années 70 cette politique impose au couple de n’avoir qu’un seul enfant, sous peines de sanctions (pour réduire la fécondité chinoise). Face à la grogne et aux dérives (par exemple on ne déclarait pas les petites filles) les autorités ont progressivement assoupli cette politique.
TAÏKONAUTE : navigateur chinois de l’espace (Europe = spationaute / EU = astronaute / russie = cosmonaute)
ZES : une Zone Economique Spéciale est un espace chinois disposant d’avantages fiscaux et administratifs afin d’en faire
une zone d’ouverture vers l’extérieur. Créées en 1980, il y en a actuellement 15 dont Shenzhen (vers Hong Kong) et Pudong (vers Shanghai).
MAO ZEDONG : dirigeant chinois qui fit de la Chine un pays communiste en 1949. Il meurt en 1976. Son successeur, DEND XIAO PING réforme la Chine. L’actuel dirigeant chinois est monsieur HU JINTAO.

terminale STG synthèse suite

POLES ET AIRES DE PUISSANCE :

Les fractures du monde actuel
On peut distinguer 2 fractures mondiales : les différences de développement et l’intégration à la mondialisation.
Les fractures du développement
Le développement se mesure par la richesse (on utilise surtout le PIB par habitant) et par les conditions de vie que l’on apprécie par le niveau d’éducation, la santé, l’espérance de vie, l’accès à l’eau potable, l’alimentation, etc. Un indicateur de synthèse existe, c’est l’IDH, auquel on a ajouté depuis peu l’IPH.
Les inégalités de développement sont de 3 types
la fracture Nord / Sud existe toujours : l’expression « Tiers monde » est née en 1952 mais cette fracture est devenue plus
compliquée à cerner car les différences au sein du Nord et au sein du Sud se sont creusées ;
les inégalités sociales se creusent à l’intérieur des sociétés, qu’elles soient du Nord ou du Sud
 les inégalités régionales à l’intérieur même des pays se creusent également entre des espaces plus dynamiques, souvent des villes littorales, et des espaces en retard de développement, souvent des campagnes de l’intérieur
Les fractures acctuelles Consulter la carte 1 : les Nord et les Sud
Consulter la carte 2 : des espaces inégalement intégrés à la mondialisation
Les obstacles au développement
Les pays du Sud les plus en difficultés rencontrent des obstacles externes (hérités de la période coloniale souvent) puisqu’ils sont dépendants des pays riches pour leur commerce et ils sont très endettés et des obstacles internes : faiblesse de l’état (souvent corrompu), troubles politiques, pression démographique, maladies infectieuses et inégalités sociales.
Le défi du développement durable
Les pays, du Nord comme du Sud, ont un défi commun à relever, celui du développement durable : comment concilier la nécessité du développement économique tout en assurant l’équité sociale et en préservant l’environnement menacé par l’effet de serre, le réchauffement climatique, l’épuisement des énergies fossiles, ou la déforestation massive ? A Rio en 1992 se tient le 1er « sommet de la terre » l’idée du développement durable est lancée et des actions sont engagées (ex les Agenda 21). Mais sa mise en place est difficile car les priorités de certains états et des FTN s’opposent au DD (ex, les Etats-Unis ont refusé d’appliquer les décisions du protocole de Kyoto sur les émissions de gaz à effet de serre) et parce que les états du sud (comme
la Chine) considèrent que le DD est une entrave imposée par les pays riches à leur propre développement.
Notions et vocabulaire
AGENDA 211 : désigne les propositions faites lors du sommet de la terre à Rio en 1992 pour assurer le développement durable pour le XXI° siècle que les états, les régions, les collectivités doivent mettre en œuvre progressivement.
DEVELOPPEMENT : désigne une situation dans laquelle la qualité de vie d’une société est satisfaisante : richesse suffisante, activités économiques diversifiées et bonnes conditions de vie.
DEVELOPPEMENT DURABLE : notion qui s’est développée à partir du « sommet de la Terre » de Rio en 1992 : l’idée est que le développement d’aujourd’hui ne doit pas compromettre le développement futur. Pour cela il faut prendre en compte les nécessités économiques mais également tenir compte du bien être des sociétés et des fragilités de l’environnement.
IDH : indicateur de développement humain, créé par l’ONU en 1990, il est calculé à partir du PIB/ht, de l’espérance de vie et du niveau d’éducation (on prend le taux d’alphabétisation et la durée des études). L’IDH s’étend entre 0 et 1 avec 3 seuils : moins de 0.5 signifie un important retard de développement ; entre 0.5 et 0.85 en développement incomplet ; au
dessus de 0.85 un développement satisfaisant. Mais attention, l’IDH est une moyenne !
IPH : indicateur de pauvreté humaine qui mesure le degré de pauvreté dans les pays ; l’indicateur est calculé différemment pour les pays riches et les pays pauvres.
PAYS LES MOINS AVANCES (PMA): ensemble d'une cinquantaine de pays reconnu par l'ONU : ils présentent les aspects les plus avancés du sous-développement : pauvreté, instabilité politique, retards sociaux énormes, sous-équipement. Ils sont à l'écart de la mondialisation et semblent complètement oubliés.
PIB: produit intérieur brut, total des richesses produites sur un territoire. On divise cette richesse par le nombre d’habitants pour obtenir le PIB/HT. Souvent on essaye de tenir compte du taux de change entre les monnaies par la PPA (parité du pouvoir d’achat). On utilise également le RNB (revenu national brut : au PIB on ajoute les entrées et sorties de
capitaux – nouveau nom du PNB).
PROTOCOLE DE KYOTO : ce document (1997) engage les signataires à réduire les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2012. Les grandes puissances devront réduire ces émissions d’environ 6%. Les Etats-Unis n’ont pas signé.
TIERS MONDE: expression créée par le français Alfred Sauvy en 1952 pour désigner les pays les plus pauvres du monde, nés, pour la plupart de la décolonisation. Il faisait allusion au Tiers Etat français pour caractériser un ensemble de pays très peuplés mais pauvres et sans pouvoir face aux 2 autres mondes, capitaliste et communiste. Aujourd'hui cette expression n'est plus guère employée car la situation est devenue beaucoup plus complexe.

terminale STG synthèse

POLES ET AIRES DE PUISSANCE : synthèse

Les espaces de la puissance
3 aires de puissance dominent la planète et à
l’intérieur de ces 3 aires on distingue des centres
d’impulsion mondiaux (CIM) à l’influence immense.
La Triade
La puissance et la richesse sont concentrés dans
les 3 pôles de la Triade (75 % du PIB mondial,
du commerce et des IDE) :
 Les Etats-Unis sont l’hyperpuissance
mondiale ; le Mexique et le Canada lui sont
associés par l’ALENA
 L’Union Européenne est une puissance
avant tout économique et financière, mais
l’absence d’unité politique empêche son
rayonnement mondial.
 Le Japon domine l’aire de l’Asie Orientale
constituée de puissances émergentes
(Chine, Corée du Sud, Taiwan, Singapour).
C’est une aire de puissance économique
avant tout.
Les centres d’impulsion mondiaux
Les très grandes métropoles (CIM) commandent le monde. A l’échelle planétaire elles ont des liens étroits entre elles (elles fonctionnent en réseau et sont des interfaces)
 on parle de l’AMM. New York, Tokyo, Paris, Londres et Francfort sont des villes mondiales ;
viennent ensuite d’autres grandes métropoles, dans la Triade (Los Angeles, Milan, Osaka, etc.) mais également dans les pays émergents du Sud (Shanghai, Hong Kong, etc.)
Les villes mondiales, associées à d’autres métropoles proches, forment 3 mégalopoles :
 La Mégalopole Nord-américaine s’étend sur 800 Km de Boston à Washington : elle est la plus puissante du monde
 La Mégalopole Européenne (la dorsale) s’étend de Londres à Milan, sur 8 états et concentre la ½ de la richesse de l’UE
 La Mégalopole japonaise (le Tokaido) s’étend sur le littoral sud de l’archipel nippon
Ces Mégalopoles sont ouvertes au monde par des interfaces maritimes.
Notions et vocabulaire
AIRE DE PUISSANCE : espace géographique qui exerce une influence sur l’organisation du monde. On distingue la puissance économique, géopolitique, territoriale et culturelle. Seuls les Etats-Unis ont, à un degré élevé ces 4 attributs et exercent cette puissance sur la planète entière (on parle de SUPERPUISSANCE, voire d’ HYPERPUISSANCE .
ARCHIPEL METROPOLITAIN MONDIAL : les puissantes métropoles de la planète sont reliées entre elles par des flux multiples et variés : on les compare à des îles éloignées mais appartenant au même archipel (= ensemble d’îles).
CENTRE D’IMPULSION MONDIAL (CIM): très grande métropole qui exerce une influence à l’échelle mondiale car elle concentre des pouvoirs de décision (sièges sociaux d’entreprises et grandes institutions), une puissance financière (bourses), des capacités d’innovation (universités, centres de recherche) et des flux très nombreux (nœuds de communication).
INTERFACE : zone de contact entre 2 espaces différents, lien parfois de tensions mais surtout d’échange.
MEGALOPOLE : ensemble de métropoles et de villes étiré sur des centaines de km. Des liens étroits les unissent entre elles par le biais de puissants réseaux de communication.
METROPOLE : grande ville ayant d’importantes fonctions économiques, financières, d’innovation et de commandement. Elles rayonnent sur un territoire plus ou moins vaste (les plus puissantes ont un rayonnement mondial : on les appelle CIM). Si leur population dépasse 10 millions d’habitants on parle de MEGAPOLE.
POLE : lieu qui concentre des activités diversifiées et qui, en étant au cœur d’un réseau de communication, influence et organise l’espace qui l’entoure à l’échelle locale, régionale, nationale voire mondiale.
TRIADE : regroupement des 3 ensembles les plus riches et puissants de la planète : Etats-Unis, Union Européenne, Japon. On parle parfois d’OLIGOPOLE MONDIAL.

mardi 22 février 2011

les républiques indépendantes en 1991

Le jour où les régimes claniques ont pris le dessus

En 1991, dédaignés par l'Europe, négligés par la Russie, les républiques soviétiques du Kazakhstan, du Kirghizstan, de l'Ouzbékistan, du Tadjikistan et du Turkménistan ont créé de nouveaux Etats pratiquement ex-nihilo.

14.02.2011 | Salla Nazarenko | Oasis

Au début de cette année, en ouvrant le Helsingin Sanomat, le plus grand quotidien de Finlande, je suis tombée sur une photo saisissante, celle d'un énorme char soviétique sous les chenilles duquel apparaissait une paire de jambes. Accompagnait cette image une interview de deux Lituaniennes qui avaient survécu par miracle à l'entrée des chars soviétiques dans Vilnius, en 1991. Cette histoire a littéralement été celle d'une survie physique, celle de la construction d'un pays petit mais uni - la Lituanie - de son adhésion à l'Union européenne et aux structures européennes en tant que membre à part entière. La Lituanie reste pauvre et vulnérable, mais pour elle comme pour les deux autres pays Baltes, l'indépendance a été un tournant décisif. Elle semble désormais installée pour toujours, et malgré tout, malgré les aléas du cours de l'euro et les humiliations que lui impose l'Europe, la Lituanie se sent beaucoup mieux que du temps où elle faisait partie de l'Union soviétique. Sur place, aucune nostalgie.

En Asie centrale, la question de l'indépendance ne se pose pas de la même manière. Là, ce qu'on peut se demander c'est si les choses se sont améliorées durant les deux décennies écoulées. Les dernières années du pouvoir soviétique ont été accompagnées d'un tel chaos qu'aucune personne normalement constituée ne saurait les regretter. Le système soviétique, même si certains disent le contraire, était condamné à s'effondrer un jour ou l'autre. Cela s'est produit plus tôt que ce que beaucoup pensaient, et avec beaucoup plus de fracas que l'avaient envisagé les experts les plus pessimistes. L'onde de choc de cet éclatement a rendu indépendants tous les pays d'Asie centrale [Kazakhstan, Ouzbékistan, Tadjikistan, Turkménistan, Kirghizstan], sans que ceux-ci aient eu à se battre pour l'arracher ou aient connu un nationalisme organisé. Sur place, il n'y avait que le désir de l'intelligentsia de se sentir plus libre, et voilà que soudain, ces "stans" [pays] obtenaient ce qu'ils n'auraient jamais pu espérer, l'indépendance.

Depuis, en l'espace de vingt ans, les pays d'Asie centrale ont remplacé l'ancien système par leurs propres régimes, claniques, corrompus et opaques. Le Kirghizstan est le seul où élections et émeutes populaires répétées ont joué un certain rôle dans la vie politique. Ailleurs, tout se déroule en coulisse, par le biais de liens d'amitié, de corruption et de relations familiales. La justification tacite de cet état de fait est la suivante :"Gardons les anciens dirigeant qui ont déjà volé tant et plus, un nouveau pouvoir pourrait être pire". Aujourd'hui, après toutes ces années, il est facile de dire que l'Asie centrale aurait eu besoin qu'on lui accorde plus d'aide et d'attention au début des années 1990. Mais à cette époque, l'Europe et les Etats-Unis considéraient comme primordial de régler la situation d'une Yougoslavie en train d'imploser. L'ex-URSS était alors vue comme un trou noir, une vaste pagaille dont c'était à la Russie de s'occuper. Or, en 1991, elle n'en avait pas la capacité. C'est ainsi que les pays d'Asie centrale ont eu une opportunité en or, une chance de bâtir ex nihilo des Etats indépendants. Ils ont à la fois brillamment réussi et échoué.

Visiter Astana [la nouvelle capitale du Kazakhstan] constitue un vrai choc. Mais toute cette pompe ne permet pas de dissiper un sentiment de malaise. On se retrouve dans une sorte de Manhattan posée au milieu des steppes, et où les prix sont exorbitants. C'est une ville pour privilégiés. Le Kazakhstan est devenu une source de gêne pour l'Occident. En 2007, lorsque j'ai émis des réserves sur le fait qu'il prenne [pour une année] la tête de l'OSCE [ce qui s'est produit en 2010], les spécialistes m'ont rétorqué qu'il fallait essayer de lui donner une chance. On a prétendu que la présidence de l'OSCE inciterait les Kazakhs à entreprendre des réformes démocratiques. On a vu le résultat. Nazarbaev et son entourage ne semblent pas avoir la moindre intention de réformer le pays.

Cette arrogance n'a rien de surprenant. Parler de démocratie tout en annihilant cette même démocratie ne pose aucun problème à Nazarbaev. De ce point de vue, Islam Karimov, le président de l'Ouzbékistan et Gourbangouly Berdymoukhammedov, le président du Turkménistan, sont beaucoup plus francs. Ils gardent leurs pays fermés et entretiennent des systèmes qui ne sont pas démocratiques, mais ne jouent pas au plus malin avec l'Occident, auquel ils vendent leurs hydrocarbures. Il faut dire que l'Occident, ou plus exactement les Etats-Unis, joue un rôle particulierdans la vie de ces deux pays. Le Turkménistan surtout occupe une place importante dans le soutien aux forces de coalition de l'OTAN qui font la guerre en Afghanistan.

Le Tadjikistan fait de gros efforts. A Douchanbé, la capitale, les bâtiments flambant neuf, les banques, les parcs, l'accès wi-fi disponible dans le square qui se trouve derrière l'Opéra impressionnent. Mais, comme à Astana, il s'agit d'un mirage dans le désert. Le PIB par habitant du Tadjikistan demeure l'un des plus faibles de la planète, et une énorme quantité de familles vivent grâce à l'argent que leur envoient des parents émigrés en Russie. L'armée de chômeurs restés au pays ne bénéficie pas des innombrables chantiers ni du développement du Tadjikistan.

Le Kirghizstan, malgré les réformes démocratiques qu'il a entreprises, ne saurait constituer un exemple de réussite. Déficit budgétaire record, réfugiés de la région d'Och livrés à eux-mêmes après les massacres de juin 2010, tout souligne l'incapacité totale de l'Etat.

Une partie des problèmes de l'Asie centrale réside dans une compréhension trop superficielle de l'idée de nation. Dans ces pays, "nation" ne signifie pas "unité". Les nomades n'étaient pas unis, ils se divisaient en clans rivaux, en lutte permanente pour l'espace et les ressources. Le pouvoir soviétique les a mis tous ensemble, les a mélangés avec des Russes et beaucoup d'autres peuples de toute l'URSS, puis a obligé tout ce monde à aller dans des bureaux faire semblant de travailler. L'indépendance a fait sauter les verrous, forçant les Russes à partir et les autochtones à deviner ce qu'était le nationalisme et à se demander s'il fallait l'instaurer. Ainsi, le Kazakhstan a décrété que le kazakh devait être la seule langue officielle du pays, alors que certains Kazakhs ne la parlaient même pas. Cette marginalisation est parfois appelée "discrimination positive", mais les résultats sont toujours négatifs.

Outre l'unité, une nation a besoin de solidarité. Or cela n'a rien de naturel. Il faut créer des institutions que les citoyens devront respecter. Cela commence par un système fiscal efficace, combiné à une bonne protection sociale. Il faut aussi imposer la primauté de la loi. Or rien de cela n'existe, et c'est bien là l'échec, que je qualifierais de phénoménal, de l'Asie centrale. Ces pays ont pourtant une longue tradition juridique. Il y a un millénaire, Samarkand et Khiva étaient des centres mondiaux des lois islamiques. Les vingt prochaines années n'apparaissent pas très réjouissantes pour l'Asie centrale, mais elles pourraient tout de même se révéler décisives. Il faudrait pour cela que ces pays se montrent capables de construire des relations d'affaires profitables avec leur voisin qui monte en puissance, la Chine, et que leurs dirigeants comprennent que la redistribution des richesses n'est pas seulement une question abstraite de "justice", c'est une nécessité vitale pour parvenir à la stabilité. Alors, quelque chose de bien pourrait se produire. Mais pour l'instant, c'est l'avidité qui l'a emporté, dans les cinq pays, sans exception